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L’arabe en chantant 2/2

L’arabe en chantant 2/2

Chers apprenants d’arabe,

Et si on faisait un peu d’arabe avec des « divas » comme enseignantes ?

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En lien avec la future exposition de l’IMA qui portera ce titre, suivez ici les paroles de deux chansons-culte en arabe littéral, qui font désormais partie du patrimoine lyrique du monde arabe, « du golfe à l’Océan ».

Vous les retrouverez ci-après dans leur graphie arabe, mais vous pourrez également voir défiler les paroles sur le lien youtube qui vous est donné. Vous pourrez en saisir la symbolique grâce à une traduction libre, en comprendre le vocabulaire grâce au lexique, et vous essayer même à reproduire les sons grâce à la transcription phonétique.

La chanson qui suit, AL ATLAL, est interprétée par Oum Kalsoum, chanteuse égyptienne dont on a pu dire qu’elle était « La quatrième pyramide d’Egypte » pour la suprême maîtrise de son art. Sa tessiture était par ailleurs tout à fait exceptionnelle, embrassant toute la gamme orientale, et sa figure omniprésente dans tout le monde arabe. Le poème est d’Ibrahim Naji, un poète égyptien contemporain de la Diva. La musique est du compositeur Riyad As Sounbati.

Le vocabulaire ici est d’un registre classique, un peu moins courant que celui de la première chanson. Il renvoie à un genre poétique très ancien de la littérature pré-islamique, celui des « lamentations sur les ruines », dans lequel le poète pleure à la vue du campement déserté par la tribu de la personne aimée.

Retrouver cette page en version pdf : L'arabe en chantant.pdf (1005.19 KB)

La difficulté supplémentaire consiste ici à reconnaître les lettres à travers une calligraphie différente de celle qui est donnée ci-dessous, une graphie dite koufique, parce que née à Koufa, dans l’Irak de la période abbasside. L’autre difficulté étant de ne pas se laisser distraire par les images kitsch qui accompagnent hélas souvent ces vidéos mises en scène par des amateurs zélés. (A noter que l’accent égyptien prononce le « j » comme un « gu », et nous avons pris le parti de reproduire ici la prononciation égyptienne, comme dans la chanson. De même, nous avons gardé le masculin pour le narrateur, bien que la chanteuse soit femme, car les élégies en arabe évoquent l’être aimé comme un absolu, en quelque sorte neutre).

Texte en arabe 

الأطلال

يا فؤادي لا تسل أين الهوى .. كان صرحاً من خيالٍ فهوى
اسقني واشرب على أطلاله .. واروِ عني طالما الدمع روى
كيف ذاك الحب أمسى خبراً .. وحديثاً من أحاديث الجوى

لست أنساك وقد أغريتني .. بفمٍ عذب المناداة رقيقْ
ويدٍ تمتد نحوي كيدٍ .. من خلال الموج مدت لغريق ْ
وبريقاً يظمأ الساري له .. أين في عينيك ذياك البريق ْ

يا حبيباً زرت يوماً أيكه .. طائر الشوق أغني ألمي
لك إبطاء المذل المنعم .. وتجني القادر المحتكمٍ
وحنيني لك يكوي أضلعي .. والثواني جمرات في دمي

أعطني حريتي أطلق يديَّ .. إنني أعطيت ما استبقيت شيَّ
آه من قيدك أدمى معصمي .. لِمَ أبقيه وما أبقى عليَّ
ما احتفاظي بعهودٍ لم تصنها .. وإلام الأسر والدنيا لديَّ

أين من عيني حبيبُ ساحرٌ .. في نبل وجلال وحياء
واثق الخطوة يمشي ملكاً .. ظالم الحسن شهي الكبرياء
عبق السحر كأنفاس الربى .. ساهم الطرف كأحلام المساء

أين مني مجلس أنت به .. فتنةٌ تمت سناء وسنى
وأنا حبٌ وقلبٌ هائمُ .. وفراش حائرٌ منك دنا
ومن الشوق رسولٌ بيننا .. ونديمُ قدم الكأس لنا

هل رأى الحب سكارى مثلنا .. كم بنينا من خيالٍ حولنا
ومشينا في طريق مقمرٍ .. تثب الفرحة فيه قبلنا
وضحكنا ضحك طفلين معاً .. وعدونا فسبقنا ظلنا

وانتبهنا بعد ما زال الرحيق .. وأفقنا ليت أنّا لا نفيق
يقظة طاحت بأحلام الكرى .. وتولى الليل والليل صديق
وإذا النور نذيرٌ طالعٌ .. وإذا الفجر مطلٌ كالحريق
وإذا الدنيا كما نعرفها .. وإذا الأحباب كلٌّ في طريق

أيها الساهر تغفو .. تذكر العهد وتصحو
وإذا ما التأم جرح .. جدّ بالتذكار جرحُ
فتعلّم كيف تنسى .. وتعلّم كيف تمحو

يا حبيبي كل شيء بقضاء .. ما بأيدينا خلقنا تعساء
ربما تجمعنا أقدارنا .. ذات يوم بعد ما عز اللقاء
فإذا أنكر خل خله .. وتلاقينا لقاء الغرباء
ومضى كل إلى غايته .. لا تقل شئنا فإن الحظَّ شاء

 

Traduction libre (par Nada Yafi)

Les ruines

 

Ô mon cœur ne demande pas où est l’amour

C’était un édifice de chimères

Qui s’est écroulé

Remplis ma coupe et buvons sur ces ruines

Tu pourras raconter mon histoire

Tant que des pleurs couleront

Pour étancher ma peine

Tu raconteras cet amour devenu

Simple histoire parmi d’autres

De passions révolues

 

 

Je ne puis t’oublier, toi qui m’avais conquis

Par des paroles si douces et tendres

Par cette main tendue vers moi

Comme à travers les flots

A une personne qui se noie

Comme aux yeux du promeneur 

Une lumière brillante

Où donc a disparu

Cet éclair dans tes yeux

 

Ô mon amour dont j’ai pu visiter le repaire

A l’oiseau envolé je chante ma douleur

Toi qui avais sur moi tout pouvoir

De m’accabler ou me ravir

Avec l’iniquité des tout-puissants

Ma nostalgie pour toi me brûle la poitrine

Les secondes dans mes veines

Sont des braises ardentes

 

Rends-moi enfin ma liberté

Délivre-moi

Moi qui ai tout donné

Et plus rien ne possède

Ces chaînes me blessent les poignets

Pourquoi garderais-je des liens

Que toi-même tu as reniés

Pourquoi demeurer prisonnier

Alors que l’univers m’appartient

 

Où est-il à présent cet amant enchanteur

Auréolé de noblesse, de majesté, de grâce

Au pas si assuré, tel celui d’un monarque

À la cruelle beauté, à l’allure si fière

Au parfum pénétrant de nature printanière

Et au regard rêveur tel le songe d’un soir

 

Que ne puis-je encore être auprès de toi

Que ne puis-je revivre un tel envoûtement

Tel un cœur éploré, un frêle papillon

Tremblant à ton approche

Le Désir entre nous était un messager

Un aimable échanson nous portant l’élixir

 

A-t-on jamais vu des amoureux plus ivres ?

Que de mondes imaginaires n’avons-nous pas bâtis ?

Par des chemins baignés de lune,

Nous avons marché

Notre joie bondissant devant nous,

Riant comme deux enfants

Nous avons couru

Jusqu’à devancer notre ombre.

 

Revenus à nous, après l’extase

Nous nous sommes hélas réveillés

Un douloureux éveil a balayé les songes

Et la nuit s’est enfuie, cette fidèle amie

La lumière est venue comme une terrible annonce

Et l’aurore a surgi semblable à l’incendie

Le monde, tel qu’il est, s’est rappelé à nous

Les amants sont partis, chacun de leur côté

 

Ô toi qui rêves éveillé

Qui revis les serments d’autrefois

Et puis te ressaisis

A peine une blessure s’est-elle refermée,

Que le souvenir s’emploie

A en ouvrir une autre

Alors apprends à oublier,

Apprends donc à effacer

 

Ô Mon amour tout est écrit

Nous n’avons pas choisi

D’être si malheureux

Peut-être nos chemins

Se croiseront- ils un jour

Après une trop longue attente

Mais si ce jour- là

Les amants devaient se renier

Que nous devions l’un à l’autre

Etre des étrangers

Chacun poursuivant ses desseins

Ne dis pas : nous l’avons voulu

Mais bien plutôt : c’est le Destin

 

Lexique

 

Cœur

فُؤاد

Amour

هَوى

Tomber, chuter

(le poète joue sur la polysémie du mot)

هَوى

L’imaginaire

خَيال

Raconte !

اِرْوِ(رَوى)

Désaltérer

(le poète joue sur la polysémie)

رَوى

Est devenu un phénomène passé, une information.

أَمْسى خَبَراً

(Sujet de) conversation

حَديث

Tu m’as séduit, attiré, conquis

أَغْرَيْتَني (أَغْرى)

Une bouche exquise (ici par son discours, mais la métaphore est double)

فَم عَذْب

Appel, invitation pressante

مُناداة

Eclair, éclat de lumière, étincellement

بَريق

Bosquet, fourré

أَيْك

A soif de (ici : est attiré par)

يَظْمَأ (ظمأ)

Nostalgie

حَنين

Brûle, marque au fer rouge

يَكْوي (كَوى)

Les côtes ;

par extension, la poitrine

أَضْلُع

Ensanglanter

أَدْمى

Pourquoi le préserverais-je ?

(le serment, le pacte)

لِمَ أُبْقيهِ

Lui qui ne m’a pas préservé

وَما أَبْقى عَلَيَّ

Ici : Pourquoi garderais-je ?

ما احْتِفاظي (اِحْتَفَظَ)

Des serments que tu n’as pas respectés

بِعُهودٍ لَمْ تَصُنْها (صانَ)

Jusqu’à quand la captivité ?

إِلامَ الأَسْر (إِلى مَتى الأَسْر)

Au pas assuré

واِثق الخُطْوة

Timidité, pudeur, par extension grâce

حَياء

attirant

شَهِيّ

Orgueil, fierté

الكِبْرِياء

Parfum, fragrance

عَبَق

magie

سِحْر

Littéralement : les souffles des collines (métaphore renvoyant aux senteurs de la nature)

أَنْفاس الرُبى (نَفَس \ رابِية)

Rêveur, songeur, pensif

ساهِم

Œil, regard

طَرْف

Séduction

فِتْنة

Beauté, éclat, lustre

سَناء

Fulgurance, étincellement

سَنى

Errant, désemparé

هائِم

Imaginaire, chimère

خَيال

Indécis, irrésolu

حائِر

Compagnon, échanson

نَديم

La coupe (de vin)

الكَأْس

Ici : Nous avons été dessoûlés (littéralement : être attentif)

اِنْتَبَهْنا (اِنْتَبَهَ)

Après que

بَعْدَ ما

Se terminer, disparaître

زالَ

Le nectar ; ici : l’ivresse

الرَحيق

Nous nous sommes réveillés

أَفَقْنا (أَفاقَ)

Si seulement nous avions pu ne jamais nous réveiller

لَيْتَ أَنّا لا نُفيق

A emporté

طاحَ بِـ

Les songes du sommeil

أَحْلام الكَرى

Ici : s’arrêter, prendre fin

تَوَلّى

Avertissement

نَذير

Signe du destin

طالِع

Et voilà que

وَإِذا

L’aube pointe

الفَجْر مُطِلّ

Sommeillait (d’un sommeil léger)

تَغْفو (غَفا)

Tu te rappelles

تَذْكُر(ذَكَرَ)

Le pacte, le serment

العَهْد

Tu te réveilles (se réveiller, prendre conscience, revenir à la raison)

تَصْحو(صَحا)

Si une blessure se referme

وَإِذا ما التَأَمَ جُرْح

Se renouveler

جَدَّ

Par le souvenir

بِالتِذْكار

Efface

تَمْحو(مَحا)

Destin

قَضاء

Nous avons été créés

خُلِقْنا (خُلِقَ)

Un jour

ذاتَ يَوْم

Nos destinées

أَقْدارنا (قَدَر)

Chacun vers ses desseins

كُلّ إِلى غايَتِهِ

Renier

أَنْكَرَ

Compagnon, ici amant (e)

خِلّ

Nous nous sommes rencontrés

تَلاقَيْنا  (تَلاقى)  

Une rencontre (comme entre des) d’étrangers

لِقاء الغُرَباء

La Chance, la Fortune, le Destin a voulu

الحَظَّ شاءَ

 

 

Transcription phonétique simplifiée …pour amateurs de karaoké

(Pensez bien à mettre l’accent sur les syllabes en caractère gras, c’est tout aussi important, sinon plus, que la prononciation des phonèmes. Certains de ces phonèmes restent bien sûr à travailler avec vos enseignants, en présentiel, dès que possible. Quelques sons emphatiques sont signalés par une lettre soulignée.)

Y’a fou-a-di taçal ayna lhawa

Kana ­sarhane mine khayaline

Fa hawa

Isquini wach-rab ala Atlalihi

Wa r’wi aanni talama dam-ou rawa

Kayfa zhâka l’houbbo amsa khabarane

Wa hadithane mine ahadithi l’hawa

 

Lastou anssâke wa qad aghraytani

Bi faméne azhbi l’mounâdati raquiq

Wa yadine tamtaddou nahwi

Kayadine mine khilali l’mawgui moudate li ghariq

Wa bari-quéne yazhma-ou ssari lahou

Ayna fi aynika thayaka l’bariq

 

Ya habibane zourtout yawmane ayka-hou

Ta-ira Chawqui ou-ghanni alami

Laka Ibtâa-ou l’mouzhilli l’moun’3imi

Wa tajanni l’qadiri l’mouh-takimi

Wa hanini laka yakwi adlou-i

Wa ththani gamatone fin dami

 

Aatini hourriyati

Atliq yadayya

Innani aataytou mastabquaytou chayya

Ahi min qaydiqua adma mea-ssami

Aaaah min qaydiqua adma mea-ssami

Lima oubqihi wa ma abqa alayya

Ma htifazhi bi ‘ouhoudine lam tassounha

Wa lima l-asrou wa ddouniya ladayya ?

 

Ayna min ayni habibone sahirone

Fihi eizzone wa galalone wa haya-e

Wa-thiqou l’khoutwati yamchi malakane

Zhalimou l’houssni

Cha-hiyyou l’Kibriya-a

Abiqoui ssihri

Ka-anfassi rrrouba

Sahirou ttarfi Ka-ahlami l’massa-e

 

Ayna minni maglissone anta bihi

Fitnatoune tammate sana’ane wa sana

 

Wa ana houbbone wa qalbone ’émone

Wa farachone ha-irone minka dana

Wa mina chawqui rassoulone baynana

Wa nadimone qaddama l’ka’assa lana

 

Hal ra-a l’houbbo soukara

Mithlana

Kam banayna min khayaline hawlana

Wa machayna fi tariquine mouqmirine

Tathibou l’farhatou fihi quablana

Wa dahiq’na dih-ka tiflayni maane

Wa ‘adawna fassabaqna zhillana

 

(Suivent ici plusieurs répétitions du couplet, avec des variations vocales, selon la tradition du Tarab. C’est un bon exercice d’écoute pour les accents et pour distinguer les voyelles longues des brèves).

 

Wa n’tabahna baada ma la rrahiq

Wa afaqna layta anna la noufiq

Yaqzhatone tâ-hate bi ahlami l’qara

Wa tawalla llaylou wallaylou ssadiq

Wa izha nnourou nazhirone taalionne

Wa izha l’fagrou moutillone kalhariq

 

Wa izha ddounia kama naarifouha

Wa izha l’ahi-ba-ou koullone fi tariq

Ayyouha Ssahirou

Taghfou

Tazh-kouroul ‘ahda wa tass-hou

 

Wa izha ma l’ta-ama gourhone

Gadda bi’ttazh-kari gourho

Fata’allam kayfa tansa

Wa taallam kayfa tam’hou

 

Ya habibi koullou chay’ene bi qadâ-e

Ma bi aydina khouliqna tou-‘assa-e

Roubbama tagma-‘ouna aqdarouna

Zhata yawmine

Baada ma ‘azza liqaa

Fa izha ankara khillone khilla-hou

Wa talaqayna liqaa l’ghouraba-a

Wa mada koullone ila ghâyati-hi

taqol chi’ena

Fa inna l’hazha châ-e

 

Article publié le01/04/2020

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