Terminé
18 février 2006

L’Odyssée musicale

Initiés très tôt à la musique arabe, Amine et Hamza M’Raihi ont obtenu à 13 et 12 ans leur diplôme de musique arabe et le premier prix au diplôme de l’instrument, Amine pour le cûd et Hamza pour le qânûn. Aujourd’hui âgés respectivement de 19 et 18 ans, les frères M’Raihi sont des valeurs sûres de la musique instrumentale arabe et orientale. En effet, Amine a atteint une maîtrise exceptionnelle et une très haute pratique du cûd. Il réussit à en tirer de nouvelles sonorités repoussant les limites de cet instrument. Quant à Hamza, il a établi la jonction entre la très grande technicité du qânûn turc et l’expressivité du qânûn arabe.

Mais Amine et Hamza n’en seraient pas là s’ils ne possédaient en outre ce supplément d’âme, cette liberté nécessaires à la maîtrise de l’art de l’improvisation. Animés par la passion de la musique et par la soif de nouvelles expressions musicales, les deux jeunes virtuoses ont sillonné les scènes prestigieuses du Festival de la médina de Tunis, de l’Opéra du Caire, du théâtre de la Médina de Beyrouth, du Festival international de la BBC à peine leurs 16 ans révolus, et ont sorti en Europe trois opus dont Asfâr («Voyages»), leur dernière création présentée à l’IMA.

A travers des pièces instrumentales et chantées, Asfâr est une recherche de nouveaux espaces mélodiques. Combinant leur connaissance des maqâmât orientaux aux inestimables poèmes mystiques du soufi el-Hallaj ou du poète Abû Nuwwas, les prodiges tunisiens développent des sonorités aériennes et imagées. Laissant une place de choix au chant arabe, le talentueux Mohamed Jebali sort loin des sentiers battus des structures et des modes usuels. Car les poèmes sont découpés selon la nécessité expressive musicale et non selon la contrainte métrique. Ainsi, les mélodies vocales infiniment raffinées fusionnent avec l’orchestration. La voix du ténor se prête tour à tour à l’évocation de l’amour divin, puis à des vocalises jazzy et inspirées, avec la précision d’un instrument de musique. Nous sommes en présence d’une nouvelle forme de chant arabe, une expression inédite entre la musique instrumentale et la chanson.

Pour conter cette invitation au voyage au public, la formation est complétée par Birol Gurkan à la clarinette, Heiko Dijker au tabla et Lotfi Soua aux percussions, qui insufflent au takht (« orchestre ») tour à tour, des sonorités indiennes, turques et persanes.

Aujourd’hui, Amine et Hamza M’Raihi poursuivent des études de médecine, emboîtant le pas à leurs parents. Mais ils continuent de composer et de se produire pour notre plus grand plaisir.