Terminé
12 juin 2004

Jazz et soufisme

Avec Dhafer Youssef

En Autriche, où il ne s’était guère soucié de ce que devenaient les valses de Vienne, son nom circule dans les cercles les plus éclairés (par la bonne musique) et les plus créatifs (par leur côté underground). Normal, il lui arrive encore de hanter les nuits teintées de jazz (il a côtoyé Marcus Stokhausen, Carlo Rizzo, Nguyen Lê…) et de méditation soufie de la cossue ville de Vienne où il résidait, avant de poser oud et bagages à Paris. Né en 1967 à Teboulba (Tunisie), ce virtuose du luth connaît son maqâm (mode classique arabe) sur le bout de ses doigts fins et habiles, mais il n’a jamais voulu rester sur son quant à soi. Sa musique trouve ses racines dans la tradition soufie mais demeure toujours largement ouverte à tout apport issu d’autres cultures, notamment le courant électronique, comme en témoignent ses deux magnifiques et envoûtants précédents albums Malak et Electric Sufi. Par son approche poétique du luth arabe et son jeu vocal tout en arabesques, il est l’une des plus impressionnantes révélations du chant arabe actuel.

Explorateur moderne, il est heureux quand le jazz est là. De plus, il possède un don d’improvisation peu commun. Dans son dernier opus, Digital Prophecy (Enja), dédié à l’écrivain libanais Amin Maalouf, il va plus loin en établissant la jonction parfaite entre la chaleur du soufisme maghrébin et la sensualité du froid nordique. Il adopte aussi et surtout, dans ses thèmes, un point de vue politique prônant le dialogue et la tolérance, à l’exact opposé des clichés médiatisés en Occident. A la fois profonde et d’une lecture aisée, ses compositions sont toutes porteuses d’un groove entêtant. Lors de ce concert, il sera accompagné par la légion norvégienne formée Eivind Aarset, un guitariste…diabolique, et Rune Arnesen, percussionniste avisé, et l’Allemand Dieter Ilg, à la double-basse rugissante.