Terminé
14 novembre15 novembre 2003

Hommage à Blaoui Houari et Ahmed Wahby

Blaoui le modernisateur
Né le 23 janvier 1926, ce mythe vivant du asri-gharbi (moderne oranais qui mènera au raï électrique des années 80) a été initié à l’art musical par son père, virtuose de la kouitra (luth algérien). Plus tard, il écoutera attentivement les chioukhs, avant de mettre en musique leurs superbes poèmes, dont Bakhta de Cheikh Abdelkader El Khaldi, repris ensuite par Khaled. Il démarre réellement sa carrière dans les années 40, d’abord comme musicien et chef d’orchestre, quand Mahieddine Bachtarzi, une figure incontournable de la musique algérienne, le charge d’animer tous les quinze jours, durant six mois, la saison de l’Opéra d’Oran. Ensuite, dans les années 50, il impose sa voix chaude, sa guitare et son style sur des disques, enregistrés chez Pathé, où figurent ses premières compositions modernes ainsi que des classiques revisités, en particulier le fameux Rani Mhayar de Benyekhlef Boutaleb. Affaibli par la maladie, il a arrêté la scène, mais il n’a jamais cessé de composer, y compris pour des artistes aujourd’hui, reconnus au niveau international, comme Cheb Mami. La nouvelle génération continue de lui rendre visite comme on le fait pour un saint et attend toujours de lui un conseil ou une composition.
>Blaoui HouariWahby, le crooner de l’OuestPrécurseur du raï moderne, il a une voix de velours, majestueusement grave. Né Ahmed Driche Tedjini le 18 novembre 1921 à Marseille, d’un père algérien et d’une mère française d’origine italienne, Wahby (pseudonyme en hommage au chanteur égyptien Youcef Wahby), bon joueur de luth et fan des icônes égyptiennes Mohamed Abdel Wahab et Farid El Atrache, a réussi l’équilibre parfait entre mélodies orientales et poésies d’essence bédouine. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il est successivement mobilisé sur les fronts de Tunisie, du Rhin et du Danube. En 1942, il profite d’une permission pour aller se produire à l’Opéra d’Oran, avec l’orchestre dirigé par Blaoui Houari. Il choisit de chanter Nadani Qalbi, un titre d’Abdel Wahab. Les années 50 vont le consacrer maître du gharbi, un genre typiquement oranais inspiré du bédouin, auquel il rajoutera un peu de mélodie du Nil. C’est au cours de cette période qu’il signera ses morceaux de bravoure, dont Alache Tloumouni et Wahrane Wahrane (les deux ont été repris par Khaled), ainsi que Ya Twil Regba, sur un texte magnifique du poète Abdelkader El Khaldi. Wahby meurt le 29 octobre 1993, après une longue maladie.

En 1963, la musique dite oranaise connaît enfin une reconnaissance institutionnelle avec la création de l’orchestre de la station régionale de la RTA (Radio Télévison Algérienne) à Oran, sous la direction de Blaoui Houari. On y trouve les musiciens et chanteurs qui ont, pour la plupart, débuté dans les années 50 : Boutebna, Belkheir, Fliti, Taïbi Mohamed, Boutlélis, Hadjouti Boualem, Saïd Bouarfa, Bendhiba et les frères Serrour. Avec sa chanson sur Ahmed Zabana, le premier à être condamné à mort et exécuté pendant la Guerre de Libération, Blaoui compose, sur un texte de Chérif Hamani, un des sommets de la musique oranaise. L’orchestre est dissous en 1967, alors que Senhadji chante Come on by by avec le groupe Azhar de Farani, qui accompagnera Hfif, Bouzid Hadj, Boutaïba Sghir et, dix ans plus tard, les débuts de « young » Khaled. La chanson oranaise fait le lit de ce qui naîtra un peu plus tard d’abord sous le label « pop raï », ensuite « raï » tout court pour enclencher une nouvelle aventure musicale. Mais le style Blaoui ou Wahby n’a pas pour autant disparu, grâce à des artistes comme Souad Bouali et Baroudi Bekhedda, accompagnés par l’excellent chef d’orchestre et violoniste Baye Bekkaï.avec Souad Bouali et Baroudi Bekhedda, accompagnés par Baye Bekkaï et son orchestre

Souad Bouali, la voix de la corniche
Née le 9 octobre 1964 à Constantine, elle suit des études musicales au conservatoire d’Oran de 1970 à 1977, puis elle est nommée professeur d’éducation musicale au C.E.M. Son entrée dans l’univers de la musique passe par la chorale de la télévision locale de la métropole de l’Ouest, où sa voix remarquable sort du lot. Sa première apparition en solo date de 1983, mais c’est à partir de 1984, année de l’enregistrement de ses premières chansons, qu’elle accédera à la popularité, grâce à des titres signés Blaoui Houari, Baye Bekkaï, Mohamed Zitouni ou Abdallah Ben Ahmed. Souad Bouali a participé à divers festivals, tant en Algérie qu’à l’étranger (Maroc, Tunisie, Irak, Jordanie, France, Espagne et Cuba).

Baroudi Bekhedda, le bédouin des villes
Né le 9 juillet 1959 à Sidi El Hasni (Oran), ce flamboyant interprète bénéficie, dès l’âge de 13 ans, de l’appui et de l’enseignement précieux d’Ahmed Wahby. Il s’intéresse également à la poésie des chioukhs de sa région, tels que Hamada, Bouras ou Madani, et au chaâbi d’El Hadj M’hamed El Anka. Il améliore sa technique vocale au sein de la chorale de la RTA d’Oran et apprend à maîtriser le rythme alaoui. À l’âge de 17 ans, il participe à un concours de jeunes chanteurs et décroche le premier prix. En 1980, Baroudi Bekhedda, chantre de l’art bédouin sous ses formes traditionnelle et moderne, touche enfin le grand public avec la chanson Ya H’babi, sur des paroles de Yahia Benrabah et une musique composée par le violoniste Kouider Berkane. Ses divers enregistrements porteront la griffe de grands noms de la musique oranaise, comme Abdallah Ben Ahmed et Blaoui Houari. En 1988, son morceau Khalini Bîd ‘Alik, lui vaut d’être sacré meilleur chanteur de l’année par les auditeurs de la station radio régionale d’Oran.