Situé tout au bout de l'Europe comme un promontoire ou un Finistère, le Portugal, terre du fado, en est aussi la plus vieille nation, née dès le XIIe siècle. On peut jouer sans fin à en rechercher les origines et les influences : cela ne changera rien au fait que le fado est unique, comme l'est la saudade qui l'imprègne, sentiment de nostalgie, de blues presque intraduisible, que le poète David Morão Ferrera a défini comme « un mal dont on jouit, un bonheur dont on souffre ».
De tous les styles de fados, le plus connu est sans aucun doute celui de Lisbonne, la ville blanche, alanguie au bord du Tage, somptueuse capitale d'un empire aujourd'hui disparu. C'est un fado poignant et désespéré, un fado de la mer et de la séparation, qui chante le plus souvent la tristesse d'une femme abandonnée par un navigateur, son amant ou un marin de rencontre. Comme un rêve ou un contrepoint, y apparaît souvent la référence à la maison, foyer d'un bonheur perdu ou inaccessible. La taille cambrée, les épaules revêtues d'un long châle noir, les femmes en sont les meilleures interprètes.
Maria Da Fé est née à Porto, au nord du Portugal, et a débuté sa carrière très jeune, dès l’âge de neuf ans, en chantant dans les fêtes de quartier de sa ville. Ses qualités vocales l’ont très vite menée à Lisbonne puis sur les plus grandes scènes portugaises et internationales où elle s’est affirmée comme une des grandes divas du fado, dans la lignée d’Amalia Rodrigues qui, pendant des décennies, a incarné cette tradition et l’a fait connaître et apprécier dans le monde entier.
Rares sont ceux qui ne connaissent pas le Senhor Vinho, sa maison de fado sur les hauteurs de Lisbonne, où elle enchante le coeur des amoureux irréductibles de la saudade, l’âme empreinte de cette infinie nostalgie.
(adaptés du texte d’) Alain Chenal