Au-delà du choc militaire, cette escalade semble marquer un tournant. Depuis le 7 octobre 2023, Israël a porté des coups inédits aux bras armés de l'Iran en Syrie, au sud du Liban, et poursuit son opération militaire à Gaza, avec le soutien politique et opérationnel de son allié américain. L'opération militaire en cours vient encore assombrir le quotidien des populations civiles dans un Moyen-Orient meurtri. 
Comment lire les événements en cours ? S’agit-il pour Israël de se défendre contre une menace existentielle, plus ou moins nourrie par la vision messianique d'une partie de son gouvernement, ou de la volonté de s'affirmer comme la puissance incontestable dans la région et au-delà ? Washington et Tel Aviv partagent-ils les mêmes objectifs ? 
Les puissances occidentales ajustent prudemment leurs positions ; au sein du Sud global, la plupart condamnent ouvertement l’intervention israélienne et s'interrogent sur l'application d'un droit international à géométrie variable, ce qui pourrait les mettre en danger à l'avenir. Sur le terrain, les sociétés civiles, une nouvelle fois victimes des affrontements, se facturent autant qu'elles souhaitent l'arrêt des combats et le retour à une vie normale. 
Le conflit Iran–Israël/États-Unis ne redessine pas seulement des alliances : il bouscule les récits de légitimité, de sécurité et d’hégémonie dans la région. 
Au-delà de l'avenir du régime iranien et de ses ambitions nucléaires, assiste-t-on à l’émergence d’un nouvel ordre régional et mondial ou à l'approfondissement de la logique de guerre sans issue ? 

Avec : 

• Sylvaine Bulle, professeure de sociologie à l’EHESS et membre du LAP (EHESS-CNRS), ses recherches portent sur la conflictualité politique en Israël et dans les territoires palestiniens, ainsi que sur le sionisme religieux. Elle est l’autrice de Sociologie de Jérusalem (La Découverte, 2020) et de deux ouvrages à paraître : La Nature d’Israël. Israël dans l’Anthropocène (Bord de l’eau, 2025) et Israël-Palestine en réalité(s). Le sionisme vu d’en bas (PUF, 2025).
• Chirinne Ardakani, avocate en droit pénal et en droits des étrangers, elle défend, en particulier, les dissidents politiques à travers le monde dont la militante féministe et anti-peine de mort Narges Mohammadi récipiendaire du prix Nobel de la paix. Militante pour les droits des femmes, Chirinne Ardakani est par ailleurs co-autrice de l’ouvrage collectif Les iraniennes, de 1979 à 2024 paru en septembre 2024 (édition des femmes Antoinette Fouque), livre politique qui retrace les luttes des mouvements féministes iraniens à travers les époques.  
• Frédéric Nasrinfar, avocat au Barreau de Paris, il exerce en droit pénal et en droit du travail. Membre du bureau de l’association Iran Justice, il est un fervent défenseur des droits humains dans les contextes répressifs. En septembre 2022, en réaction au meurtre de Jina Mahsa Amini, kurde iranienne par la police des mœurs iranienne, il fonde avec Chirinne Ardakani l’association Iran Justice. Rassemblant avocats, juristes et militants des droits humains, le collectif inventorie, documente et qualifie les exactions du régime iranien dans l’objectif de traduire, un jour, ses auteurs en justice, pour que cesse l'impunité des crimes d'Etat en Iran.
• Anthony Samrani, , rédacteur en chef du quotidien libanais L’Orient-Le Jour depuis 2022, il est l’auteur de nombreux articles sur les crises qui agitent le Moyen-Orient. Il a publié Vu du Liban. La fin d’un pays, la fin d’un monde ? (Tracts, Gallimard) en 2024.

Modération : Benjamin Barthe, journaliste, spécialiste du Proche-Orient, chef adjoint du service international du quotidien le Monde, prix Albert Londres 2008. Il a été le correspondant Moyen-Orient de ce journal, à Beyrouth, entre 2014 et 2021.